Les maladies thyroïdiennes chez l’enfant
Introduction
Auparavant, les maladies thyroïdiennes, particulièrement celles caractérisées par une hypertrophie (augmentation du volume) et une hyperactivité de la glande, ne pouvaient être guéries que par le traitement chirurgical. D’ailleurs, le prix Nobel de médecine a été décerné au professeur Theodore Kocher, de Suisse, en 1906 pour avoir rendu sécuritaire la thyroïdectomie. Au cours des 50 dernières années, de nombreuses découvertes médicales sur la thyroïde ont été réalisées et celles-ci ont mené à une diminution de la nécessité du traitement chirurgical. Cependant, ce dernier demeure une partie essentielle de la prise en charge de beaucoup de troubles thyroïdiens, encore aujourd’hui.
Les examens préopératoires
L’hypertrophie ou les dysfonctionnements de la thyroïde sont de natures diverses, et les patients atteints doivent subir les examens appropriés afin que le bon diagnostic puisse être posé. Les examens sont généralement des épreuves d’évaluation de la fonction thyroïdienne, des clichés de la thyroïde réalisés en médecine nucléaire, des échographies et, les plus importants, les biopsies à l’aiguille fine de la glande. Selon les résultats obtenus aux tests et les antécédents du patient, le médecin peut le diriger vers un chirurgien qui déterminera si un traitement chirurgical est de mise et pourrait être avantageux.
Les indications de la chirurgie
Le traitement chirurgical est particulièrement indiqué chez les patients qui présentent des nodules jugés cancéreux décelés principalement par biopsie à l’aiguille fine. Bien que la biopsie à l’aiguille fine permette de déceler le tissu cancéreux, elle permet surtout de mettre en évidence les lésions « cellulaires » ou « folliculaires » évocatrices d’une tumeur. Ainsi, même si le diagnostic étayé par la biopsie n’est pas strictement celui du cancer, il confirme la présence de lésions suffisamment évocatrices d’un cancer pour commander un traitement chirurgical.
Les patients qui présentent une hypertrophie et une hyperactivité de la thyroïde pourraient devoir subir une chirurgie. C’est particulièrement le cas des patients qui présentent des nodules isolés ou multiples. Généralement, les patients atteints de la maladie de Basedow-Graves n’ont pas besoin de chirurgie, sauf peut-être ceux dont la thyroïde est très hypertrophiée ou qui présentent un seul nodule considéré comme froid à l’imagerie ou encore les rares patients dont la maladie doit être rapidement maîtrisée. Ceux qui présentent également une ophtalmopathie importante et qui ne répondent pas aux agents antithyroïdiens pourraient également être dirigés en chirurgie puisque, dans certains cas, l’atteinte oculaire est aggravée par l’administration d’iode radioactif.
Les patients qui ont été exposés à une irradiation de la tête et du cou peuvent présenter des nodules thyroïdiens qui nécessiteront une ablation chirurgicale, particulièrement en raison d’une fréquence de 30 à 60 % du cancer de la thyroïde. Au Canada, un tel traitement par des radiations était indiqué en cas d’acné ou de tumeur des vaisseaux sanguins de la peau du visage ou, parfois, d’une « hypertrophie du thymus ». D’autres patients ont été exposés à des radiations dans le cadre du traitement d’un cancer ou d’un lymphome de la tête et du cou.
Il arrive que des patients montrent une hypertrophie si importante que la glande thyroïde exerce une pression sur l’œsophage ou la trachée provoquant une difficulté à avaler et à respirer et une sensation d’oppression. Une radiographie thoracique permet de confirmer une déviation de la trachée par la thyroïde hypertrophiée. Dans un tel cas, la chirurgie se révèle efficace et pourrait être la solution thérapeutique à privilégier.
Le déroulement de l’hospitalisation
Le patient qui doit subir une chirurgie de la thyroïde est généralement admis à l’hôpital après avoir passé les examens préopératoires pertinents, notamment une radiographie thoracique, un électrocardiogramme et diverses analyses sanguines, y compris des épreuves d’évaluation de la fonction thyroïdienne. La chirurgie est réalisée à partir d’une incision relativement courte pratiquée dans le bas du cou, au centre. Les muscles centraux du cou sont écartés, puis le lobe de la glande thyroïde est excisé après une dissection minutieuse visant à préserver les nerfs laryngés supérieur et récurrent, qui aboutissent tous deux aux cordes vocales, ainsi que les glandes parathyroïdes, qui équilibrent les taux de calcium dans l’organisme.
Dans certaines situations, notamment dans les cas de maladie bénigne, seule une portion ou la moitié de la thyroïde doit être retirée. La thyroïde est formée de deux lobes symétriques. Lorsque tous deux sont hypertrophiés ou en présence d’une tumeur ou d’une maladie de Basedow-Graves, il peut s’avérer nécessaire de procéder à l’ablation de la plus grande partie de la glande.
En cas de cancer de la glande thyroïde, le chirurgien doit vérifier s’il s’est disséminé aux nœuds lymphatiques du cou. Dans l’affirmative, eux aussi devront probablement être excisés au moyen d’une technique chirurgicale appelée « curage ganglionnaire cervical », qui permet de ne modifier que de façon minime le fonctionnement et l’apparence. L’incision réalisée pour la thyroïdectomie pourrait devoir être allongée latéralement à la base du cou afin d’exposer davantage ses structures, ce qui facilite le curage.
Une fois l’intervention terminée, le chirurgien suture soigneusement l’incision. Le patient est généralement en état de recevoir son congé de l’hôpital un ou deux jours après la chirurgie. Les points de suture peuvent être enlevés deux jours après l’intervention. Le patient doit se présenter au cabinet du chirurgien pour un suivi une semaine après la thyroïdectomie. Certains établissements offrent la thyroïdectomie en chirurgie d’un jour. Des techniques chirurgicales assistées par vidéo, légèrement moins effractives, sont utilisées dans certaines circonstances, généralement en présence d’une atteinte bénigne.
Les effets indésirables de l’intervention chirurgicale
Immédiatement après la chirurgie, le patient peut présenter une enflure dans la région du cou où l’incision a été pratiquée, un mal de gorge, une certaine difficulté à avaler et une légère douleur à l’arrière du cou attribuable à la position du patient durant l’intervention. Tous ces maux sont habituellement d’intensité faible à modérée et disparaissent progressivement d’eux-mêmes dans les jours ou les semaines qui suivent la chirurgie.
Il arrive parfois que du liquide s’accumule sous l’incision refermée. Le chirurgien doit alors le drainer au moyen d’une aiguille et d’une seringue. Cette technique permet de facilement prendre en charge cette accumulation, et il est formellement établi que la réouverture de l’incision est inutile. Rarement, le patient peut subir une certaine modification de la voix habituellement attribuable à une forme de laryngite provoquée par une irritation du larynx, causée par le tube qui y a été introduit pour l’anesthésie. Elle se résorbera en quelques semaines ou mois. Une lésion du nerf récurrent peut faire en sorte que la voix devient rauque ou faible, mais il est très rare que cela se produise, car une chirurgie exécutée avec minutie permet de l’éviter complètement. Dans le cas de cancers, la maladie peut avoir détruit le nerf récurrent, et on doit parfois procéder à son ablation pour retirer la tumeur; sa perte est alors inévitable.
Lorsque la glande thyroïde est totalement excisée, il n’est pas rare qu’une hypocalcémie (faible taux de calcium dans le sang) survienne, mais celle-ci est facilement traitée au moyen de suppléments de calcium. Cet état se stabilise habituellement par lui-même, mais il peut prendre quelques semaines ou quelques mois avant que les taux de calcium reviennent à la normale et que la prise de médicaments ne soit plus nécessaire. Il arrive que le patient doive prendre des comprimés de calcium durant toute sa vie. Cette situation se produit surtout lorsqu’un cancer étendu de la thyroïde a donné lieu à une manipulation excessive de la glande durant la chirurgie, lésant au passage les glandes parathyroïdes.
Généralement, l’incision guérit très bien et est très acceptable sur le plan esthétique. Un épaississement de la cicatrice ou une chéloïde (bourrelet fibreux se développant sur la cicatrice) peuvent apparaître chez les personnes de race noire ou d’origine orientale ou encore chez les adolescents. On les traite efficacement par une injection de cortisone.
Le traitement postopératoire
Après la chirurgie, un traitement de remplacement de la thyroxine est obligatoire chez tous les patients dont la thyroïde a été complètement excisée et chez certains patients ayant subi une thyroïdectomie partielle.
Si le patient a subi la chirurgie en raison d’un cancer, il pourrait avoir besoin d’un traitement par l’iode radioactif. La nécessité de ce traitement sera confirmée par l’analyse par un pathologiste du tissu prélevé durant l’intervention. Le médecin traitant doit émettre ses recommandations sur un tel traitement.
Il est important que tous les patients ayant subi une thyroïdectomie fassent l’objet d’un suivi de la fonction thyroïdienne. La prise de comprimés d’hormones thyroïdiennes est simple et ne nécessite aucun suivi compliqué. Les patients ayant présenté un cancer pourraient devoir être examinés plus souvent que les autres en plus de devoir subir des radiographies du cou et un dosage de la thyroglobuline afin de déceler la récidive possible du cancer. En présence d’un taux de calcium toujours trop faible, la prise de calcium et de vitamine D est de mise, et un suivi est nécessaire.
Les résultats de la thyroïdectomie
Les patients ayant subi l’ablation de la thyroïde se rétablissent généralement bien et rapidement et montrent peu de signes de l’intervention pouvant être remarqués. Les effets indésirables de la chirurgie se doivent d’être minimes. C’est pourquoi il vaut mieux s’assurer que le chirurgien qui réalisera l’intervention possède l’expérience nécessaire de la chirurgie thyroïdienne. Le traitement chirurgical du cancer est remarquablement efficace, et le taux de guérison associé est extrêmement élevé. Après s’être rétablis de leur chirurgie, les patients devraient se sentir en bonne santé et pleins d’énergie.
Mise à jour en octobre 2009 par Hortensia Mircescu, M.D., FRCPC, Division d’endocrinologie, Centre hospitalier de l’Université de Montréal, professeure adjointe de clinique, Faculté de médecine, Université de Montréal.